Cher Monsieur,
J’ai été heureux de recevoir votre bulletin et je tiens à vous remercier chaleureusement de créer parmi nos frères du monde un éveil pour la paix. Le concept de paix qui est commun à tous les esprits, bien que détruit par le moi du mental individuel, fonctionne sur une base individualiste pour atteindre l’objectif personnel de chacun, compte tenu de l’étroitesse d’esprit des gens.
Dissiper cette idée de moi individuel et travailler en harmonie pour le bien commun est l’exigence du moment. Les conférences et réunions qui se tiennent à cette fin ne semblent être qu’une étincelle jetant une lueur fugitive sur des fragments de paix épars. Leurs cris dans le désert ne les mèneront pas loin sur le chemin du succès en raison de l’agonie matérielle de la foi, qui agit à la base.
La seule chose requise pour l’instant est donc d’améliorer les mœurs et de discipliner le mental. Nous devons apprendre à créer dans le cœur un sentiment d’amour universel, qui est le remède le plus sûr à tous les maux et qui peut nous aider à nous libérer des horreurs de la guerre.
Je suis parfaitement d’accord avec notre regretté ami Bernard Malan, lorsqu’il exprimait sa foi dans l’union pour une recherche commune du bonheur. Le bonheur est bien entendu nécessaire pour mettre un terme à tous les chagrins, mais il est semblable au trou noir des scientifiques, qui ne leur permet pas de progresser vers l’amour universel.
Afin d’atteindre le niveau du bonheur véritable, nous devons absolument nous élever au-dessus de nous-mêmes, ce qui est essentiel pour créer une atmosphère d’amour universel. Il s’agit de l’élément fondamental pour résoudre ce problème, et l’Inde a toujours été à sa recherche. Elle n’a jamais empiété sur le territoire d’autres pays à des fins de guerre ou d’effusion de sang, non par lâcheté, mais parce qu’elle a réalisé son pieux devoir envers l’humanité. Tous vivaient heureux chez eux, malgré les tortures infligées par les incursions d’autres nations. Ces tortures n’étaient pour eux que des fleurs envoyées par le Maître divin pour les entraîner à atteindre les étapes indispensables à l’élévation du genre humain, individuellement ou collectivement. Cette graine est plantée si profondément que ses branches continuent de porter des fleurs qui embaument l’air d’une douce fragrance de paix et de bonheur. Elle est enracinée si profondément que la pire des tempêtes ne pourrait la déraciner.
Voilà ce qui est nécessaire pour l’élévation du genre humain et que chacun, en Occident comme en Orient, doit considérer comme partie intégrante de son devoir. Si les fondements de la paix ne reposent pas sur une base spirituelle, il ne faut pas espérer des perspectives meilleures.
Il est absolument sûr et certain que tôt ou tard nous devrons adopter des principes spirituels si nous voulons maintenir notre existence. Si les incursions et les attaques peuvent être évitées par la force matérielle, l’effusion de sang ne peut être évitée, car là encore, nous devons avoir recours à la force, provoquant ainsi une effusion de sang d’un côté ou de l’autre. L’arrogance ne peut être arrêtée par la force matérielle. Seule la force spirituelle peut éliminer, de l’esprit des êtres, les causes de la guerre.
Le problème suivant, tout aussi complexe, est de savoir comment introduire ces notions parmi les masses qui méconnaissent encore le bien-fondé de la chose. Si l’on me demandait mon avis, je proposerais la méthode la plus simple possible, telle qu’indiquée ci-dessous.
Que tous les frères et sœurs s’assoient quotidiennement à heure fixe, là où ils se trouvent, et méditent environ une heure avec la pensée que l’amour et la piété se développent chez tous les êtres du monde.
Ce processus, bien qu’il ne soit pas suggéré par des motivations exclusivement spirituelles, s’avère extrêmement efficace pour obtenir le résultat souhaité et tisser la destinée de millions de malheureux.
Je prie pour le succès de votre noble mission.
Sincèrement vôtre,
Ram Chandra
Président, Shri Ram Chandra Mission
Shahjahanpur, UP, Inde
Le 8 juillet 1957